Je n’aime pas l’IAO de garde.

J’étais de garde cette nuit aux urgences (garde très tranquille, j’ai bien dormi merci).

Nous chez nous, on a ce qu’on appelle une IAO (infirmière d’accueil et d’orientation), un petit personnage fort utile, qui sert à accueillir le patient, lui prend ses constantes, l’interroge rapidement sur ses antécédents et son traitement (ce qui donne, dans les antécédents : « choléstérole, appendicite » et « ttt pour l’hippo-phise », avec comme motif d’admission « douleur thoracique » alors que c’est anémie à 8g. Bref. Du bon boulot).

Hier soir donc, la découverte d’anémie est envoyée par le médecin traitant. Et elle a mal dans la poitrine. L’IAO vient me voir et me dit « douleur thoracique faudra lui faire un ECG ». Très bien. Comme je suis un ignorant petit externe inutile, la clinique ou le motif d’admission ou même la dernière bio de la patiente ne m’intéresse certainement pas. Je suis là pour faire les ECG et les gaz du sang. Et BRANCARDER. Et je suis tellement naze que j’aurais jamais pensé à faire un ECG à une douleur tho. MERCI IAO.

Je vais voir Mme M donc, 69a, un antécédent particulier qui ne m’aide pas, et retrouve la dernière bio dans ces affaires, qui date d’il y a une semaine. Elle est suivie en néphro visiblement puisqu’elle a des rdv, et puis sa clairance est à 13… Une anémie, qui plus est normochrome et normocytaire paraît normale dans ce contexte d’IRCT mais bon. La dernière hb à 8,5 il y a un mois.

Je recherche différents points d’appel infectieux, des signes d’hémorragie extériorisée, rien, à part des crépitants en base gauche et de légers OMI. Elle souffle à tous les foyers, c’est fort et systolique, probablement une IM fonctionnelle sur son anémie. Bon bah c’est tout, je prescris un bilan de base et un bilan infectieux, l’ECG, et une voie d’abord (je ne peux faire que ça en tant qu’externe, je dois attendre l’interne ou le chef pour le bilan martial ou le groupage par exemple. Et pour les traitements).

En allumant l’ordinateur pour écrire l’observation, je découvre les constantes prises par l’IAO : saturation à 90%, tension artérielle à 20/12 entre autres. Donc on laisse traîner la patiente à 90 de sat sans rien dire à personne.

Je cours pour lui reprendre sa sat, elle était pas dyspnéique, pas cyanosée, juste les crépitants à l’auscultation. Sat à 80%. Je la scope, cours chercher un masque et un manomètre, dois la mettre sous 5L d’O2 pour qu’elle ne « normalise » qu’à 93-94%. Je revérifie la PA, 19/8, refais rapidement le point sur l’HTA, pas de signe de complications (ouf !). Et fais les gaz du sang, et l’ECG (bah oui quand même !).

Sur la main courante, aucun médecin n’a encore inscrit ses initiales. L’interne ne veut pas la voir elle s’en va dans une demi-heure (ma garde commence à 13h, celle des internes à 18h). La PH me répond : « OK t’as bien fait ». Point. Pas grave, je surveille le scope, et dès que les internes de garde arrivent, je leur saute dessus. Finalement on a pu gérer l’histoire avec l’interne de pneumo, très sympa.

OK, j’ai paniqué sur le moment, parce que je gérais seul, pour la première fois, un patient pas stable. OK, j’aurai du demander à l’IAO les constantes de la patiente, et j’aurai dû les reprendre malgré tout, en connaissant l’anémie. Je n’y ai pas pensé, mais vraiment pas.

Mais être IAO ne se résume pas à prendre les constantes et à considérer les externes comme des machines à ECG. Je préfère prendre moi-même les constantes de ma patiente, et laisser madame antécédents-de-« sueures-froides » brancarder.

Nous sommes tous les deux fautifs. Mais moi je suis étudiant.

Keep cool, and see you.